Afin d’élargir leur marché, les commissaires-priseurs peaufinent leur stratégie sur la Toile, qui change profondément leurs habitudes.
En France, les ventes en ligne ne représentent encore que 5 % du marché de l’art. Les commissaires-priseurs conjuguent enchères en salle et sur la Toile, sans toujours une stratégie claire. C’est pourquoi le Syndicat des maisons de vente (Symev) a récemment réuni les prestataires susceptibles de les aider à vendre dans le monde entier.« Les sites sur lesquels nous faisons nos enchères en ligne sont des fournisseurs d’accès spécialisés dont nous sommes tributaires pour élargir notre activité. Ce développement d’Internet est une chance, mais a aussi un coût », explique Jean-Pierre Osenat, président du Symev.
Parmi ces prestataires, l’anglais Antiques Trade Gazette a déjà géré plus de 7.500 ventes en ligne et prépare la deuxième génération du « live », les enchères en direct : système de paiement sécurisé, avis sur la fiabilité des acheteurs, services pour se prémunir des défaillances techniques… « Notre site attire des acheteurs de plus de 100 pays », précise Richard Lewis, directeur d’ATG. Le plus puissant, l’américain Artfact offre une couverture des ventes et une base de données sur l’art internationales.
Démythifier la vente d’art
« L’an dernier, les maisons de vente ont effectué sur nos plates-formes pour 4,5 millions d’euros de transactions en « live », avec seulement 2 % d’impayés », souligne Nicolas Tricaud de Montonnière, d’Artfact, qui s’est lancé dans les applications mobiles et dans la promotion sur réseaux sociaux.
Le français Auction.fr veut, pour sa part, démythifier la vente d’art. « Nous cherchons à donner le maximum d’audience aux ventes que les commissaires-priseurs publient chez nous, à inciter les internautes à pousser la porte des salles françaises, virtuelles ou physiques », explique Jean-Christophe Delfine, président du site. Ses services sont disponibles depuis un mobile, une tablette, ou encore un écran de télévision. Plus de la moitié des internautes du site passent plus de 5 ordres d’achat par an, et 41 % sont des étrangers. Leurs préférences vont aux peintures et arts graphiques, livres et BD, bijoux et montres. « Tout ce qui s’expédie facilement se vend bien », note Jean-Christophe Delfine.
« Reconquérir les 30-40 ans »
Conscients que l’existence de 300 sites de maisons de ventes obligeait l’internaute à naviguer, des commissaires priseurs lyonnais ont créé pour leurs pairs Interencheres en 2000. Cet outil coopératif, qui a présenté plus de 20.000 ventes l’an dernier, s’est positionné sur les ventes en « live » depuis octobre.« L’intérêt est de reconquérir les 30-40 ans. Le marché classique s’est déplacé vers l’e-commerce, il faut s’adapter », souligne Dominique Le Couent, président du directoire. Entre 300 et 400 euros, le panier moyen est moins élevé qu’en salle.
Pour Drouot, pas question de vider l’hôtel des ventes, mais impossible de négliger le Web. Sa revue, « La Gazette » , est présente sur Internet pour l’avant-vente, le calendrier, les annonces, et Drouot Livedéveloppe une offre numérique variée. « Nous gérons et créons des sites Web, organisons la visite virtuelle de salles, numérisons les catalogues, retransmettons des ventes en direct, faisons du webmarketing… », souligne Olivier Lange, directeur général de Drouot Patrimoine et d’Auctionpress.
La France est un terrain doublement propice à l’essor du marché de l’art en ligne. « Elle a l’un des meilleurs taux de pénétration d’Internet en Europe », rappelle Thierry Robin, directeur d’Atos Consulting. Et « elle reste un grenier d’objets d’art », souligne Jean-Pierre Osenat.